
En cette rentrée littéraire 2025, je suis frappée par le nombre d’écrivains qui puisent l’inspiration dans l’histoire de leurs parents et aïeux… Non des moindres, de ceux qui obtiennent les grands prix littéraires : Emmanuel Carrère (prix Renaudot), Laurent Mauvigné (Prix Goncourt), Amélie Nothomb,… et j’en passe, et on en passe toujours des meilleurs[1] !
Qu’est-ce qui pousse ainsi les auteurs à traquer la vie passée de parents et aïeux en dénichant leurs souvenirs dans des agendas, des journaux intimes, des lieux, des objets et des archives ? L’époque est-elle si noire que le passé soit un refuge ? La rapidité, l’emballement des évolutions technologiques qui nous projettent dans le cyberquelquechose nous coupent-ils tellement de nos racines que le souvenir s’impose, que la transmission devient un impérieux besoin ? Le présent est-il si inquiétant, le futur si opaque qu’il faille se réfugier dans l’histoire, dans notre histoire ?
Je ne sais.
Très loin de moi l’idée de me comparer aux grands écrivains que je viens de citer. Pourtant je viens aussi d’écrire un livre sur mon grand-père ! Donc ce n’est pas original. D’ailleurs, quantité de personnes plus ou moins connues[2], font également de même. Mais nous vivons tous dans le même siècle et sommes probablement soumis aux mêmes influences.
Pourtant… croyez-moi ou non, j’étais précurseure !
Il y a près de cinquante ans, ma mère me donnait 47 cahiers d’écoliers le Callygraphe demi-format, 150 pages chacun, à petits carreaux couverts de l’écriture élégante et parfaitement lisible du hussard noir de la République qu’était mon grand-père maternel, né en 1884.
Il y a près de cinquante ans que j’ai découvert consignée dans ces cahiers d’écolier l’histoire de son enfance sur le plateau jurassien ; de son adolescence au Séminaire où on le destinait à la prêtrise et dont il s’extirpa in extremis ; de sa carrière dans l’Instruction publique interrompue par la Grande Guerre qu’il fit en partie en Orient, dans les Dardanelles ; de ses amours entre deux sœurs, dont l’une, son épouse, était ma grand-tante et l’autre sa maîtresse, avant de devenir ma grand-mère ! La petite histoire d’un homme en débat avec ses propres valeurs, en rupture avec les codes moraux, en accord avec certaines politiques, en opposition avec d’autres. La petite histoire d’un homme anonyme aux prises avec la grande histoire d’un XXème siècle débutant qu’il ne traversa pas indemne. Un homme enfin qui, vieillissant, retranché sur son Aventin, occupait, attentif et critique, son temps libre à observer et commenter de sa plume acérée le Monde entrer allègrement dans ce capitalisme technologique, consumériste et libéral dont nous héritons aujourd’hui pour le meilleur ou pour le pire.
Il y a près de cinquante ans, je m’étais promis d’éditer un jours ses cahiers. Impossible de le faire tel quel : des milliers de pages et un récit qui n’est pas toujours linéaire. Il fallait lire, trier, reprendre, couper, choisir, et enfin raconter autrement. Ou renoncer et laisser à l’archiviste et à l’historien le soin d’en faire leur miel.
Cinquante ans après, je suis en retraite. J’ai le temps de m’y consacrer.
J’ai donc trié, repris, coupé, choisi et enfin raconté.
Je vous présente « Les cahiers de Paul ».
Si vous souhaitez mettre à profit la trêve de Noël pour les découvrir ou pour les offrir, ils sont disponibles aux Editions Maïa : https://www.editions-maia.com/livre/les-cahiers-de-paul-sylvane-casademont-9791042517021/
Ou sur Amazon. Ou mieux : A commander chez votre libraire préféré.
Si vous souhaitez lire l’avis d’un lecteur avant de vous lancer dans l’inconnu, l’article de Christian Gatard est en ligne dans Futur hebdo : https://www.futurhebdo.fr/
Joyeuses fêtes à tout le réseau !
Sylvane Casademont
[1] Celui que je préfère dans ce domaine reste le livre de la Nobel de littérature 2022 : Annie Ernaux, Les années, publié en 2008 chez Gallimard, donc hors de la tendance actuelle :-)
[2] Voir par exemple le site de l’Association pour l’autobiographie et le patrimoine auto-biographique :
https://autobio-asso.fr/index.php/ et https://autobio-asso.fr/les-membres-de-lapa-publient
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